Partage d’expérience

Simon Potier, Expert scientifique, chercheur en écologie sensorielle, biologie de la conservation et bien-être animal.

« Il ne faut pas attendre que tout soit parfait pour se lancer : l’expérience se construit aussi en avançant. »

Peux-tu nous parler de ton parcours ?


Bonjour,

J’ai un profil un peu particulier puisque j’ai un parcours à 2 casquettes. Mais commençons par le début. Je suis né dans le monde de la fauconnerie, mon père étant fauconnier depuis 40 ans. J’ai donc vécu au milieu des rapaces depuis ma plus tendre enfance. Cette passion commune m’a permis de commencer à travailler dans les présentations pédagogiques depuis mes 15 ans. Cela fait donc 20 ans que je suis professionnel du milieu. Depuis 2018, je suis capacitaire tous rapaces et tous corvidés pour l’élevage et la présentation au public. Depuis 2023, je suis référent titulaire de la CNCFSC (Commission Nationale Consultative pour la Faune Sauvage Captive) au Ministère de la Transition Ecologique. Je suis également membre de la commission recherche de l’AFdPZ (Association Française des Parcs Zoologiques), membre du groupe SUME de l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature), membre de la commission scientifique de l’IAF (International Association for Falconry) et trésorier de l’AVM (Association des Voleries Mobiles).

En parallèle, j’ai un parcours de scientifique, puisque j’ai un master en Biodiversité, Ecologie et Evolution et un doctorat en Ecologie Sensorielle des Rapaces, réalisé à l’Université de Montpellier et au Centre d’Ecologie Fonctionnelle et Evolutive du CNRS. J’ai par la suite effectué 4 ans de postdoctorats à l’Université de Lund (Suède), en me spécialisant sur les capacités visuelles des oiseaux.

Depuis 2021, j’ai créé ma propre entreprise, qui vise à offrir des conseils, des formations, des suivis scientifiques et des supports pédagogiques auprès des structures zoologiques, des parcs nationaux, centres de recherche et l’ensemble des acteurs de chacune de ces activités. Mes domaines de spécialisation sont les connaissances biologiques, la conservation, la recherche scientifique, la réglementation et le bien-être animal. Vous pouvez retrouver mes services sur mon site internet :

www.simonpotier.fr

Tu collabores aujourd’hui avec des structures zoologiques et des centres de recherches. Quelles sont les priorités à développer dans ces structures ?

Oui je collabore avec ces structures. Je voudrais souligner le travail important des parcs zoologiques avec lesquels je travaille, notamment dans la recherche scientifique.

« J’ai tout au long de mon parcours, voulu créer un lien important entre les structures zoologiques et les centres de recherche.« 

Les structures zoologiques ont toujours été importantes dans l’accroissement des connaissances, et je reste persuadé qu’un travail collaboratif est d’une importance majeure. Je pense que cette collaboration doit continuer à s’accroître, et des ponts scientifiques doivent être renforcés. Une des priorités pour moi serait la présence accrue de chercheurs au sein des structures zoologiques et des affiliations partagées avec les centres de recherche pourraient se développer et se renforcer, mais il me semble que cette trajectoire soit déjà bien lancée.  

Qu’est-ce qui, selon toi, manque aujourd’hui dans la gestion des animaux captifs, que ce soit en parc ou en centre ?

Je ne me prétends pas pouvoir répondre à cette question pour l’ensemble des espèces, et je vais donc me concentrer sur les rapaces. A ma connaissance, il n’existe pas de centres de recherche détenant des rapaces. Concernant les structures zoologiques, les compétences du personnel sont importantes et vérifiées. La présence de capacitaire au sein de structure témoigne de compétences accrues, et en ce fait, le modèle français fait office de référence. Les domaines de la biologie, de la conservation, du bien-être animal et de l’hébergement connaissent actuellement d’importantes évolutions scientifiques et réglementaires. Il apparaît donc difficile pour les structures de suivre ces évolutions, nécessitant une nouvelle fois un travail collaboratif avec l’ensemble des acteurs du milieu. C’est donc dans ce but que j’ai développé mon activité, afin de proposer des formations adaptées dans les différents domaines, en m’entourant de personnes qualifiées et reconnues. 

Un projet qui t’anime particulièrement en ce moment ?

Il m’est difficile de choisir un projet en particulier. En ce moment, je concentre beaucoup de mes activités sur la formation des personnes en lien avec la faune non domestique. Je propose donc des formations sur des thématiques variées (biologie, bien-être animal, réglementation, écologie sensorielle), soit directement pour les structures zoologiques, soit en individuel. La transmission de connaissances a toujours été au cœur de toutes mes activités. Concernant mes activités de recherche, je travaille en ce moment sur les problématiques de collisions avec les structures anthropiques, en proposant des solutions basées sur les capacités sensorielles des espèces ciblées. Ces projets de conservation me permettent également de conforter un pont important entre les centres de recherche, les parcs naturels et les structures zoologiques. 

On entend souvent dire que le comportement est un bon indicateur du bien-être. Est-ce suffisant selon toi ?

La définition du bien-être animal est complexe et en évolution. Néanmoins, depuis quelques années, le monde zoologique s’accorde sur l’application du modèle des 5 domaines : Nutrition, Environnement, Santé, Comportement et État mental. A la différence du modèle des 5 libertés, cette approche se base sur un état positif du bien-être animal et également sur la prise en compte de l’état mental des individus. En effet, c’est l’état mental de l’individu qui reflète le bien-être des individus, s’appuyant notamment sur les autres domaines plus fonctionnels cités précédemment. Le bien-être se mesure donc par la somme des expériences vécues par l’individu, avec pour idée principale que la somme de celles-ci soit largement positive. Il est donc clair que l’observation comportementale n’est pas un indicateur suffisant, même si celle-ci reste primordiale. 

Comment fais-tu pour garder une approche rigoureuse tout en restant connecté au terrain ?

Je pense justement que l’approche rigoureuse est possible en restant connecté au terrain. C’est justement la connexion entre le terrain et la science qui permet une compréhension rigoureuse des besoins de chaque individu. Mon travail est donc de m’informer régulièrement sur les évolutions concernant les connaissances scientifiques et les nouvelles réglementations et de proposer des applications de ces nouvelles connaissances. Mon rôle est donc de proposer une expertise scientifique et réglementaire aux structures ayant des besoins spécifiques, en m’adaptant aux contraintes de chaque structure. Ayant une formation scientifique avec un doctorat en biodiversité, écologie et évolution, la rigueur constitue la base de mes activités. 

Un conseil pour un professionnel qui veut se lancer dans le domaine ?

Si je devais donner un conseil à quelqu’un qui veut se lancer dans ce domaine, ce serait : fonces, mais fais-le avec conscience. Si tu as l’expertise, la passion, et que tu as identifié un vrai besoin sur le terrain, alors tu es déjà sur la bonne voie.

 » Il ne faut pas attendre que tout soit parfait pour se lancer : l’expérience se construit aussi en avançant. « 

Dans les secteurs comme la recherche, le conseil ou la formation en lien avec le vivant, ce sont souvent les professionnels passionnés et engagés qui font la différence.

J’ai depuis tout petit eu l’envie de concilier science et transfert de connaissances du monde animalier. La recherche scientifique académique ne me permettait pas d’être en contact direct avec les professionnels du milieu et j’ai donc voulu développer une activité d’expertise, me permettant de concilier mes activités de recherche et des activités de transfert de connaissances via les activités de conseil et de formation. Me lancer dans l’entrepreneuriat n’a pas été simple : mon parcours académique ne m’y avait pas préparé. Mais malgré les difficultés, je ne regrette absolument pas ce choix.

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